Très petite vitesse: ça tombe bien, vous êtes en vacances... et si ça n'est pas le cas, vous avez la chance d'habiter des vallées où on sait encore prendre le temps de vivre. J'y ai vécu, j'y retourne souvent en balade, et j'apprécie toujours autant.

Voilà donc de quoi faire un peu plus la nique à Big Brother: je vous en dis encore un peu plus sur moi, histoire de laisser entrevoir tout ce que vous ne saurez pas. Que faisais-je à Poil (village des Alpes de Haute-Provence, accessible en 4 h de marche depuis la halte "Chaudon-Norante" du train des Pignes)? En dehors de rencontrer ma chère et tendre, s'entend... Que vais-je faire à Mézel, Chateauredon, Barrême, Saint-André des Alpes, Annot, Entrevaux, villages qui n'ont en commun que d'être reliés par le même train? Ceci est une autre histoire... en dehors des randonnées et promenades, dont je parlerai un peu ici.

METRIQUE

La voie ferrée Nice-Digne, 151 km, est la seconde ligne non SNCF par ordre d'importance après le Trinchinellu corse. Egalement très charmante, à égalité avec le train corse, surpassée seulement dans ce domaine par le train péruvien la cordillière des Andes.

C'est une voie métrique, en raison de l'espacement des rails particulier. Avec une "gare du Sud" désuète mais aussi charmante à Nice, séparée de la gare SNCF, récupérée de l'exposition universelle de 1889 comme la tour Eiffel. Construite entre 1892 et 1911, cette ligne est un vestige du réseau des chemins de fer de Provence, qui couvraient toute la région.

Une micheline vous emmènera 4 fois par jour au travers des Alpes provençales, par une soixantaine de ponts métalliques, viaducs, tunnels remarquables, parfois vertigineux. Vous y découvrirez nombre de vallées, des clues (franchissement d'un plissement géologique par une rivière), des villages perchés, de somptueux paysages. Il règne sur cette terre un calme paisible, une ambiance presque himalayenne.

Vous serez secoués, certes, car les passages sont sinueux, avoir installé là une voie ferrée constitue un tour de force, que la nature conteste comme après les crues survenues il y a quelques années où plusieurs kilomètres de voie ont été emportés par les crues. Tour de force aussi que de conserver en vie cette ligne peu fréquentée, seule desserte du haut-pays.

Le conducteur corne, s'arrête partout: la voie compte peu de gares, beaucoup de "stations" et nombre de "haltes" où il faut faire signe pour obtenir l'arrêt.

Sur la portion de ligne allant de Puget-Théniers et Annot circulent aussi un train touristique à vapeur.

A signaler un gros défaut de cette ligne, imputable à la SNCF (grr, grr... encore eux!). Trouvant non rentable la liaison Digne-St Auban, ils ont fermé dans les années 60 le tronçon permettant de relier Grenoble, Valence et Briançon à Nice via le train des Pignes. Il faut donc prendre un car à la place. Merci la SNCF... la politique "grandes lignes" au dépends des petites, de la desserte locale et du service public ne date pas d'hier!

TRAIN DES PIGNES

Pourquoi ce surnom de "train des Pignes"?

Parce que vous traverserez de belles pinèdes de pin noir, issues des plantations de restauration des terrains en montagne (RTM) réalisées vers 1900? Pas seulement...

Parce qu'il n'est pas rare de voir, depuis le train, courir un écureuil transportant ses réserves hivernales?

Parce que le train a servi au transport du bois, aux équipes de forestiers?

La raison principale du nom est remarquable: les fondateurs de la ligne, puis les chefs de gares successifs étaient aussi amateurs d'arbres. Et ils ont, petit à petit, constitué un véritable arboretum, d'une grande valeur scientifique mais aussi pour l'amateur, ne serait-ce que pour la beauté des arbres: presque chaque station est ornée d'arbres remarquables, séquoias, cyprès chauves, sapins méditerranéens, mélèzes et autres ifs, avec souvent des croisements rarissimes. Si vous voulez apprendre à reconnaître les arbres, munissez-vous d'une flore, et vous verrez le long de la ligne au moins 250 espèces différentes. Le paradis du forestier!

Mais je pense qu'il y a aussi une raison sentimentale, pour les provençaux: c'est un train "nature", qui dessert nombre de départs de randonnées. L'ayant aidé, dans les années 70, à composer son livre en parcourant avec lui certaines d'entre elles, je vous recommande à ce sujet l'ouvrage de Raoul Revelli: "50 randonnées pédestres avec le train du sud", disponible dans les librairies provençales et de la Côte d'Azur, ainsi qu'auprès de la compagnie des chemins de fer de Provence.

Bonne découverte!